HGGSP: introduction à la spécialité
Doc C. La diplomatie sportive et les Jeux de Paris 2024
Cette quatrième table-ronde du cycle Horizon 2024 traite de la dimension internationale des Jeux de Paris 2024 : Dans quelle mesure les Jeux constituent-ils un outil d'influence des Etats et des villes? Sont-ils facteur de paix et de coopération? Comment aborder la question du boycott ? Quel engagement des athlètes?
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Doc B. Les demandes de boycott des JO de Pékin 2022
Action de militants appelant au boycott des Jeux Olympiques d'hiver de Pékin prévus du 4 au 20 février 2022, pour dénoncer les violations des droits de l'homme par la Chine à Hong Kong, au Xinjiang, au Tibet ou en Mongolie-Intérieure. (Source : SCMP)
 
Doc A. Exclusion de la Russie des JO : l’embarras de Paris
4 avril 2023 Le point de vue de Pascal Boniface
Depuis le déclenchement de la guerre en Ukraine, on parle de plus en plus du clivage the West versus the Rest. Cette division s’est désormais étendue aux affaires olympiques. Il y a sur ce dossier une demande majoritaire des pays occidentaux pour que les athlètes russes et biélorusses soient exclus des Jeux olympiques. Le CIO veut quant à lui permettre aux athlètes russes et biélorusses de participer, mais à titre individuel, sous bannière neutre et sans hymne en cas de victoire. Les équipes nationales sur les sports collectifs ne pourraient pas participer. Cette proposition du CIO est vivement contestée par l’Ukraine et par ses alliés, l’Ukraine menaçant même de boycotter les Jeux olympiques de Paris si des athlètes russes et biélorusses venaient à y participer, y compris sous bannière neutre. La Russie est l’agresseur, l’Ukraine l’agressée et la Biélorussie est complice de l’agression russe. Il y a donc une rationalité à dire qu’un pays qui a déclenché une guerre contre son voisin ne puisse pas participer aux JO. Mais dans le passé, le Mouvement olympique n’a pas toujours été aussi ferme. Les États-Unis ont participé aux Jeux olympiques après le déclenchement de la guerre en Irak. Deux ans plus tard, les Jeux ont été attribués à Londres. A l’époque, les délégués des pays de l’Est ont voté non pas pour Paris, capitale du pays qui s’était opposé à la guerre, mais bien pour Londres, une capitale pro-guerre. On peut également supposer que le membre ukrainien du CIO ait à l’époque lui-même voté en faveur de Londres, même si le vote était alors secret. Les temps auraient donc changé : ce qui était admis auparavant ne l’est plus à présent et désormais, tout pays qui déclenche une guerre se verrait exclure. Encore faudrait-il donc que des sanctions soient appliquées de façon globale, ce qui n’est pas le cas. Thomas Bach, le président du CIO, estime que les pays occidentaux sont hypocrites, puisque 70 pays sont en conflit dans le monde, et qu’on ne peut tous les exclure. Il justifie ainsi la participation a minima des athlètes russes et biélorusses à titre individuel, en excluant d’ailleurs également ceux qui ont approuvé la guerre. Pour Vladimir Poutine, la participation de ces athlètes présente un avantage, et en cas de victoires, il saura se les approprier. Mais d’un autre côté, une participation sous bannière neutre montrera le caractère anormal de la participation russe. L’argument que fait valoir le CIO est qu’il serait injuste de condamner des athlètes pour le comportement de leur gouvernement. Thomas Bach, dans une déclaration le 30 mars, déclare « Il est déplorable de voir que des gouvernements ne veulent pas respecter la volonté de la majorité des parties prenantes du mouvement olympique ni l’autonomie du sport, il est déplorable de voir que ces gouvernements, n’abordent pas la question des doubles standards. Nous n’avons pas vu un seul commentaire sur leur attitude à l’égard de la participation d’athlètes des pays des 70 autres guerres et conflits armés à travers le monde. » Thomas Bach appuie là où ça fait mal car, pour les pays du Sud, la question des standards est centrale dans les différences d’appréciation de la guerre en Ukraine. On voit en tout cas qu’il y a une très forte différence de vue sur cet enjeu olympique. Les pays occidentaux sont généralement pour la décision d’exclure tout athlète russe et biélorusse des Jeux olympiques et des compétitions sportives internationales. Les autres pays sont plutôt hostiles à cette décision et dans certaines fédérations, la Russie pourrait continuer à concourir, notamment dans les fédérations asiatiques, face à une exclusion des fédérations européennes. On voit donc que cette division the West versus the Rest se niche également sur les décisions sportives et olympiques. La France, qui est l’hôte des prochains Jeux, n’a pas pris de position. Elle est coincée entre son statut de pays hôte et donc la nécessité d’être en phase avec le CIO, et son statut de pays occidental européen, groupe de pays majoritairement favorable à l’exclusion des athlètes russes et biélorusses. Volodymyr Zelensky a demandé à Macron de respecter cette règle et de ne pas accepter cette participation. Mais c’est bien le CIO qui est décisionnaire s’agissant des Jeux olympiques. Peut-être que la volonté d’exclure les athlètes russes et biélorusses passerait mieux si on l’avait appliquée aux autres pays qui se sont, dans la période récente, eux aussi lancés dans des conflits, ou si on établissait une règle générale, plutôt que de donner le sentiment qu’il n’y a que des cas particuliers.
Doc 1. PENSER EN GÉOPOLITICIEN La première difficulté consiste à définir le terme de géopolitique. Les travaux d’Yves Lacoste […] nous paraissent avoir apporté la réponse la plus satisfaisante. Aussi proposons-nous de considérer la géopolitique comme l’étude des rivalités de pouvoir(s) et/ou d’influence(s) sur un territoire donné. Le lien entre le pouvoir et le territoire sur lequel il s’exerce, tente de s’exercer, est empêché de s’exercer, refuse de s’exercer ou ne s’exerce pas, marque toute l’histoire de l’humanité. Cette relation pouvoir-territoire peut revêtir des formes diverses, depuis la compétition électorale jusqu’à la guerre mondiale en passant par la concurrence économique, par exemple. […] Examinons la démarche générale. Alors qu’une crise ou un conflit attirent l’attention, le point de départ de leur analyse géopolitique suppose la collecte d’informations. Les sources en sont pratiquement infinies […]. Il faut établir une sélection rigoureuse en fonction d’un seul et unique critère, qui constitue la problématique récurrente de l’analyse géopolitique : pourquoi tel territoire donne-t-il lieu à des affrontements ? Autrement dit, toute analyse géopolitique cherche à comprendre ce qui est en jeu : l’information est donc triée en fonction de son aptitude ou non à éclairer ce qui est, précisément, en jeu. Il s’agit bien de rechercher tout ce qui est en jeu et non pas de se limiter aux enjeux. En effet, il convient de répertorier les enjeux matériels et les caractéristiques du cadre de la confrontation, mais également d’étudier les spécificités des acteurs locaux, de cerner les idées qui amènent ces derniers dans le jeu sanglant de l’affrontement, ainsi que d’identifier les acteurs extérieurs qui participent au jeu (ou le mènent) et de comprendre pourquoi. L’analyse géopolitique part, donc, du territoire (I), puis s’intéresse aux hommes (II) qui s’y trouvent, cerne ensuite leurs motivations (III) et, enfin, repère les agents extérieurs (IV). […] La documentation nécessaire à l’intelligence des crises et des conflits n’est pas réservée à un cercle restreint de spécialistes : peu d’éléments sont tenus cachés […]. Par conséquent, si l’on sait ce que l’on cherche, on peut trouver la quasi-totalité des éléments de compréhension dans l’information « ouverte » […]. La quête par le biais d’un moteur de recherche est très aléatoire : la qualité des documents et, surtout, leur fiabilité, sont extrêmement variables. En somme, la compréhension des crises et des conflits passe par une enquête rigoureuse étayée par une documentation fiable.
Patrice Gourdin (professeur à l’IEP d’Aix-Marseille), introduction à Géopolitiques, manuel pratique, Choiseul, 2010