La forêt française depuis Colbert

Étude 1 - La forêt française : une ressource essentielle à exploiter aux xviie et xviiie siècles


Forêt : territoire d'au moins 5 000 m2 occupé par un couvert boisé de plus de 10 %.


Document 2
Une exploitation réglementée dans les bois communaux de Lorraine au xviiie siècle
Cette carte des bois de la commune de Lay-Saint-Christophe (Meurthe-et-Moselle) de 1764 montre une division de la surface forestière. On distingue des parcelles régulièrement exploitées (chauffage) et un bloc forestier mis en réserve appelé « quart de réserve » afin de produire du bois pour la construction qui nécessite des arbres plus âgés.
 
Document 4 L'influence de l'ordonnance de 1669

Les forêts d'Ancien Régime, qu'elles soient la propriété des communautés villageoises, du roi, du clergé ou des seigneurs, [sont l'objet] de droits d'usage. L'utilisation prime sur la stricte propriété foncière. Elles sont vitales pour les communautés locales : ces dernières y récupèrent du bois pour se chauffer et cuire leurs aliments, pour construire, pour s'outiller, elles y font paître leurs bêtes, y glanent quelques fruits et champignons. En 1669, l'ordonnance sur les Eaux et Forêts, est le premier code forestier rassemblant tous les règlements particuliers du royaume. Afin de faire « cesser les abus », elle interdit d'accès des portions de forêts et organise une garde active sur les forêts communales. L'ordonnance allie des objectifs de conservation, de répression et de valorisation optimale des forêts sur le long terme. Pourtant, l'ordonnance n'est pas toujours strictement appliquée. Les disettes de 1709, 1762 ou 1766 conduisent même le gouvernement à encourager les défrichements des bois particuliers pour les mettre en culture. Steve Hagimont, EHNE, 2024
Document 3
Une gestion durable des forêts pour répondre aux besoins de la marine


Au milieu du xviie siècle, la marine française est dans un piètre état […]. Seuls deux ou trois vaisseaux peuvent affronter la haute mer. La marine doit louer ou acheter des navires étrangers en cas de guerre. Colbert décide alors de réorganiser toute la filière, de la culture du chêne au chantier naval. La construction d'un grand vaisseau nécessite d'abattre jusqu'à 4 000 chênes centenaires. Or à cette époque, il n'existe pas de politique forestière digne de ce nom. Le défrichage et la surexploitation des forêts royales ont provoqué une baisse régulière de la surface boisée. La forêt s'étend alors sur environ 13 millions d'hectares. Le bois de chêne étant insuffisant, on en importe essentiellement d'Italie et d'Albanie. Le pin, utilisé pour le gréement (1), provient d'Europe du Nord. […] Mais toutes ces importations ne conviennent pas à Colbert. Aux yeux de cet homme d'État, la forêt constitue à la fois une source de richesse importante, « un trésor qu'il faut soigneusement conserver », et une ressource indispensable pour la construction de navires. […] L'ordonnance d'août 1669 scelle une reprise en main vigoureuse des forêts françaises. […] Dans la foulée, les chantiers navals sont réorganisés pour que la fabrication d'un navire prenne un rythme industriel. L'effort est considérable. En 1677, la marine est en possession de 300 vaisseaux et galères. […] C'est la Révolution qui porte un coup à cette politique. La liberté de coupe, restaurée par une loi de 1791, et l'anarchie ambiante livrent les futaies(2) au pillage. Le massif forestier s'en trouve réduit de 500 000 hectares. Jacques-Marie Vaslin, « Les chênes français, le “trésor” de Colbert », Le Monde, 27 avril 2011.

(1) ensemble du matériel nécessaire à la manœuvre des bâtiments à voile (notamment voiles et cordages)
(2) Forêt composée d'arbres de grande taille

Document 1
Le rôle de l'Etat dans la gestion forestière

1669
Par une ordonnance, Colbert entreprend une grande réforme de l'administration forestière. Elle doit limiter le recul de la forêt et permettre sa gestion durable . Des espaces préservés sont ainsi délimités et l'abattage des arbres est réglementé.
1824
L'École nationale des Eaux et Forêts est créée.

1827

Un code forestier tend à protéger et restaurer la forêt. Il restreint notamment le droit d'usage des paysans sur les forêts, ce qui entraîne des révoltes.

1964

L'État met en place l'ONF, établissement chargé de la gestion des forêts publiques dont le rôle est d'assurer la production de bois, d'accueillir le public et d'assurer la protection du territoire et de la forêt.
2001

La Loi d'Orientation sur la Forêt du 9 juillet 2001 (LOF) introduit le principe de la " gestion durable" et multifonctionnelle des forêts comme fondement de la politique forestière nationale. Elle créée un ensemble de documents d'orientation et de gestion des forêts françaises.