Le lien social
Tordre la réalité
En haut:
Un tweet ironise sur l’accueil réservé par l’Élysée à l’équipe de France victorieuse
(publié sur Observers.france24.com le 19 juillet 2018)

En bas:
Photo de l’équipe de France victorieuse de la coupe du monde de football 2018 à l’Élysée, AFPsports, 16 juillet 2018.

 
« Fake news », « infox », « canular » : des termes précis


Ne dites plus « fake news », mais « infox ». […] Le mot juxtapose « intoxication » et « information » ; il est défini [par la Commission d’enrichissement de la langue française] comme une information « mensongère ou délibérément biaisée ». […] Littéralement, « fake news » signifie « fausse information ». Mais le mot « faux » a deux sens en français, traduits de deux manières en anglais : « false », pour « erroné », et « fake », pour l’« imitation », la « copie ». « Fake news » est donc – en toute rigueur – une fausse information au sens d’une information non pas erronée, mais volontairement trompeuse. Mais […] le terme « fake news » est devenu synonyme à la fois du faux au sens de l’erroné, de l’erreur, mais aussi de la tromperie volontaire. Or le distinguo entre les deux notions semble fondamental. Un média publiant une information erronée et se corrigeant ensuite n’est pas du tout dans la même démarche qu’un activiste fabriquant ou diffusant en toute conscience une information volontairement mensongère ou trompeuse. […] Sont ainsi qualifiés, en France, de « fake news » à la fois le canular (Le Gorafi par exemple), l’information de mauvaise qualité, « attrape‑clic » qu’on trouve en abondance sur les réseaux sociaux, l’information très orientée politiquement ou idéologiquement ; ou l’erreur journalistique de bonne foi. Un flou dangereux, puisqu’il ne différencie pas ces catégories pourtant fondamentalement différentes. Pourtant, la langue française regorge déjà d’expressions bien plus claires et précises, « canular », par exemple, ou le plus moderne « intox », sans même parler de « mensonge ». Samuel Laurent, « "Infox", "intox", "canular" ou "mensonge", pourquoi il ne faudrait pas parler de "fake news" », LeMonde.fr, 24 octobre 2018.
 
Complotisme et fake news

Les discours consistant à dénoncer, lors d’un événement majeur, une « version officielle » cachant une manipulation ne sont pas nouveaux. Mais depuis le début du XXIe siècle, les nouvelles technologies de l’information et de la communication donnent à ces « théories du complot » une audience nouvelle. Les théories complotistes ont très souvent des objectifs politiques et idéologiques cachés, qu’il faut apprendre à identifier pour mieux pouvoir les contrer.

La manipulation de l’information et des images n’est pas une pratique nouvelle. Staline faisait déjà disparaître des photographies les hommes jugés indésirables ! Mais les nouvelles technologies, la quasi‑instantanéité d’Internet et le pouvoir décuplant des réseaux sociaux donnent un formidable pouvoir aux informations et aux images… qui s’avèrent parfois fausses ou trompeuses.
Sommes-nous tous complotistes ? (ft. le Sense of Wonder)
LesDécodeurs
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Vocabulaire

Désinformation : fait de répandre de fausses informations volontairement, notamment à des fins de déstabilisation politique. Hoax : rumeur et/ou canular répandu sur le Web, souvent dans une intention humoristique. Infox : néologisme, équivalent français de l’anglais fake news : fausse information répandue volontairement
Complotisme (ou conspirationnisme) : attitude pseudo‑scientifique interprétant des faits réels comme étant le résultat de l’action d’un groupe caché, qui agirait secrètement pour modifier le cours des événements en sa faveur, et au détriment de l’intérêt public.
Derrière les théories complotistes et leurs adeptes crédules, des courants politiques ont parfaitement compris le potentiel électoral de ces rumeurs qui valident leur vision du monde et diabolisent leurs adversaires. Avec le 11/09, le complotisme devient un instrument de conquête du pouvoir.

Depuis 2001, les militants des théories complotistes se présentent comme de simples citoyens, apolitiques et non partisans. Seulement curieux de faire avancer la vérité sur le 11 septembre, ils n’auraient pas d’agenda idéologique. Pourtant, dès les premiers mois de l’année 2002, les leaders de cette mouvance se sont trouvés de sulfureux parrains. A Téhéran, Damas, Caracas et Moscou, on observe l’invasion de l’Irak et on redoute d’être les prochains sur la liste de l’administration Bush. Leurs propagandistes y ont vite compris comment ces rumeurs qui diabolisent le gouvernement américain pouvaient servir leurs discours anti impérialiste et les aider à gagner la bataille de l’opinion publique. Au Moyen-Orient, certains y voient le prétexte idéal pour éviter d’avoir à poser à l’islam politique des questions qui fâchent. Discrédité en France, Thierry Meyssan devient dans ces capitales un hôte de marque, reçu par les télévisions d’Etat et hébergé par les régimes les moins recommandables. Plus près de nous, à Paris, les tenants de l’antisystème qui tentent de consolider et de monétiser leur audience ont bien compris qu’ils tenaient là une arme redoutable pour alimenter leur entreprise politique. D’Alain Soral à Dieudonné, de Jean-Marie le Pen à François Asselineau, le potentiel électoral du complotisme laisse d’autant moins indifférent qu’aux Etats-Unis les réseaux sociaux permettent à certains conspirationnistes de faire carrière : devenu multimillionnaire, Alex Jones est désormais à la tête d’un empire médiatique conspirationniste si influent que Donald Trump en fait un conseiller officieux de sa campagne présidentielle victorieuse.