La multiplication des sociétés savantes est un bon indicateur de l’institutionnalisation des différentes disciplines. On en compte 300 dans les années 1840, 750 au début du xxe siècle. Entamé dans la première moitié du siècle, le mouvement de création s’intensifie dans les années 1850 (météorologie, zoologie, chimie…), puis dans le dernier quart du xixe siècle (mathématiques, astronomie, océanographie…). Congrès et revues permettent échanges et débats entre chercheurs. Des éditeurs se spécialisent dans l’édition scientifique, comme Baillière et Masson. Ce dernier publie onze revues scientifiques en 1846, quarante en 1914.

De nombreuses découvertes et inventions datent de la deuxième moitié du xixe siècle et témoignent du dynamisme de la recherche française, qui s’intègre à un élan plus général, à l’échelle de l’Europe. La France obtient ainsi onze prix Nobel entre 1901 et 1914, ce qui la place au deuxième rang mondial derrière l’Allemagne (quatorze). Les avancées se font dans tous les domaines, comme en témoignent, entre autres, les travaux de Léon Foucault sur la vitesse de la lumière, ceux de Carnot sur la thermodynamique, de Claude Bernard sur le glucose, de Berthelot sur la synthèse chimique, de Pasteur sur la vaccination (rage, 1885), d’Henri Poincaré sur les équations mathématiques, de Charcot sur le cerveau, de Pierre et Marie Curie sur le radium…

Charles Tellier en 1912

En 1858, le Français Charles Tellier crée la première machine frigorifique à circulation de gaz ammoniac liquéfié, permettant la production de froid à usage aussi bien domestique qu'industriel. En 1865, il construit une machine à compression mécanique à gaz liquéfié. Ces inventions permettent la réfrigération industrielle (dès 1865) et le transport réfrigéré, notamment par bateau (navire frigorifique) : le premier navire équipé de systèmes de réfrigération à l'éther méthylique selon les principes de Tellier a été le Frigorifique, entré en fonction en 1876.

Le frigorifique va être utilisé pour la première fois lors d’un voyage entre Rouen et Buenos Aires en 1876 après une escale pour avarie à Lisbonne. Navigant entre 6 et 8 noeuds, il mettra 105 jours pour parvenir à destination. La cargaison de viande de boeuf, maintenue par son invention entre 0 et -2°C, arrivera en parfait état le 23 décembre à Buenos Aires. Percevant le fort potentiel de l’invention, la République Argentine ne tarira pas d’éloges lors de cette nouvelle découverte. Plus de vingt journaux argentins relatent l’aventure dont le National de Buenos-Aires qui titre le 3 janvier 1877 : « Hurrah ! mille fois hurrah ! pour les révolutions de la science et du capital ! L'aurore d'un jour nouveau naît pour La Plata? ».

Les romans scientifiques permettent également de sensibiliser le public sous une forme plus ludique. Les 62 romans des Voyages extraordinaires de Jules Verne publiés à partir de 1863 constituent l’un des plus grands succès d’édition du siècle : Le Tour du monde en 80 jours est ainsi tiré à 108 000 exemplaires entre 1873 et 1904.

L’imprimé constitue un autre vecteur de diffusion des connaissances scientifiques et un élément de ce culte du progrès. L’édition scientifique populaire est particulièrement dynamique dans le troisième quart du siècle. Les grands éditeurs créent des collections spécialisées (Bibliothèque des merveilles de Hachette, 1863-1895), rendant la science accessible aux adultes, amusante pour les enfants. Certains ouvrages connaissent un grand succès : les livraisons par fascicules de l’Astronomie populaire de Camille Flammarion (1869) attirent 45 000 lecteurs en trois ans.

Initié à Londres en 1851, le phénomène des Expositions universelles marque le monde industrialisé de la deuxième moitié du xixe siècle. Paris en accueille cinq (1855, 1867, 1878, 1889, 1900). Ces foires internationales permettent aux États participants d’exposer leurs procédés et machines les plus récents et les plus modernes. Véritables grands-messes de la science et de l’industrie, elles constituent ainsi les vitrines privilégiées du progrès technique. Ces événements attirent un public nombreux, et toujours croissant : on passe de 5 à 50 millions de visiteurs entre 1855 et 1900